Une étude américaine va faire le tour des journaux et blogs en France, je suis prête à le parier, car elle est faite pour le buzz. Une société de conseil aux États-Unis - astucieuse, mais pas tant que cela - déclare que: "86 millions d'Américains doutent de leur médecin lorsque ses propos sont en conflit avec l'information trouvée par le patient sur Internet. C'est, grandeur nature, un cauchemar pour les médecins". Depuis le temps que l'on anonne qu'Internet c'est le bagne pour les praticiens car les patients inondent leur docteur de pages imprimées à décoder, voilà maintenant qu'il existe une étude qui le démontrerait. Bigre. Silber's Blog vous dit que ce sondage est incohérent, voire démontre strictement l'inverse.
À la question: "Vous est-il arrivé de douter de l'avis de votre médecin, lorsque cet avis est en conflit avec des informations trouvées sur Internet", de 27% (65 ans et plus) à 43% des 18 à 34 ans, répondent "oui". Cela paraît énorme.
Mais ensuite, lorsqu'on demande aux mêmes personnes, "en cas d'affection bénigne (rhume), qui iriez vous voir?", 42% disent "mon médecin", alors que seuls 13% répondent "un médecin sur un forum Internet", et 2 à 3% seulement : "un autre patient qui s'exprime sur un forum". Et si c'est une maladie grave, "67% auront recours à leur médecin" alors que, dans les mêmes conditions, ils ne seraient respectivement que 13% et 3% à s'adresser au médecin du forum et à l'usager.
Je répète que malgré ses incohérences cette étude aura du retentissement parce qu'elle véhicule une crainte courante, alors qu'elle confirme in fine que c'est à son médecin, en premier lieu, que le patient va faire confiance.
Seconde question: pourquoi pensons-nous que le fait de questionner un médecin par rapport à un écrit soit une mauvaise chose? Questionner, c'est comprendre et intégrer une information. Il est impossible de bien suivre les recommandations d'un médecin si on ne comprend pas à fond leur sens. Le patient (s'il est conscient, bien sûr) est le premier membre de l'équipe médicale traitante. Sans son adhésion et sa participation pleines et entières, le traitement n'aura pas tous ses effets.
Dernier point et non des moindres: tant qu'on déclare que "le médecin doit tout savoir", on perpétue un système privé de sens. Le médecin qui doit tout savoir discute le moins possible, ne pose pas de questions, ne change pas d'avis, de peur d'avoir l'air bête...
Vive les médecins "qui ne savent pas", mais qui savent "à qui demander" de façon assurer leurs connaissances. Comment dire à leur patient qu'ils forment un couple à la recherche, ensemble, des meilleures solutions ! L'un qui, ayant étudié, connaît les choses de l'extérieur, et l'autre qui les vit de l'intérieur.
Dans un article de unairneuf.org :
La santé polluée : quid de l'indépendance des prescriptions de médicaments ? http://tinyurl.com/5uuxdf
je présentais l'évolution de la confiance des américains envers leurs autorités de santé : elle s'est effondrée en 4 ans, de 2004 à 2008, de 56% à seulement 35% de personnes faisant confiance à la Food & Drug Administration (HAS+AFSSAPS+AFSSA pour simplifier en France).
Seulement un tiers des patients font confiance à leurs autorités de santé. L'influence irrésistible des industries du médicament commence à générer une sérieuse perte de légitimité de la médecine en tant que collectif de professionnels.
Ce n'est pas tant dans leur médecin que les américains n'ont plus confiance, mais dans les références que ceux-ci sont amenés à respecter, références qui sont consultables et critiquées sur internet.
Votre analyse est en outre entachée d'une grave méprise : appliquer à une classe (les médecins) un avis sur un élément de cette classe (le médecin que l'on consulte). Ce genre de logique permet des paradoxes dont le plus connu est celui d'Épiménide le crétois : je suis crétois et menteur...
Rédigé par : Randall | 30/10/2008 à 13:43
Tout serait mieux quantifié au niveau de la prévention d'une maladie donnée.
Merci.
Rédigé par : kai | 05/08/2008 à 15:31