La problématique du HONCode ne peut être comprise sans connaître le contexte. J'apporte ici une FAQ. Les réponses sont volontairement brèves.
- Q1 Depuis quand "le problème" de la qualité des sites internet santé existe-t-il ?
- Q2 Est-ce vrai ? Y a-t-il des dangers ?
- Q3 Plus concrètement, y a-t-il eu des études de la qualité des informations ?
- Q4 Alors, la qualité des sites, c'est un gros problème ?
- Q5 Comment est-ce possible que le bilan de l'internet santé soit si positif ?
- Q6 Mais, je pensais que le médecin était de plus en plus laissé de côté, suite à Internet
- Q7 Alors, pourquoi la France est-elle le seul pays au monde à bénéficier d'un outil de certification de sites ?
- Q8 Pourquoi ne peut-on créer une base d'informations santé officielles ? Il en existe déjà beaucoup.
- Q9 Pourquoi la France commence maintenant à penser à un site officiel ?
- Q10 Quel est le bilan du HONCode en France?
Q1 Depuis quand "le problème" de la qualité des sites internet santé existe-t-il ?
- R1 On entend parler des risques du web dans tous les domaines dont celui de la Santé depuis sa création en 1994. La célèbre bande dessinée du magazine New Yorker où un chien dit à l'autre "Ce qui est bien c'est que sur le Net, personne ne sait que tu es chien" date de 1993 ! Cette image continue de capter l'attention du public en France, car elle résume bien les craintes.
- R2 Oui, bien sûr, puisque toute personne peut participer et être lue de partout. Rajoutons que Google Translate ayant fait des progrès fulgurants, nous pourrions désormais nous inquiéter des contenus du monde entier. ;-)
- R3 Il y en a eu des centaines de publications scientifiques de la qualité des sites. Visitez Medline pour vous faire votre propore avis. Ces études, par secteur, démontrent toujours l'existence de sites médiocres voire mauvais, définis par les auteurs (éléments inexacts, périmés, tendancieux, frauduleux).
- R4 Peut-être en théorie et non en pratique, car en fait, personne n'a démontré l'existence de dommages significatifs.
- Rappelons aussi que les sites "illégaux", c'est à dire qui participent à une activité criminelle relèvent de toutes les instances qui poursuivent ces mêmes actes dans la vraie vie et dans tous les domaines. Ceci est très différent de la situation des débuts de l'Internet, lorsque la majorité pensait que le monde virtuel était en dehors de celui du droit et où les institutions ignoraient internet parce que leurs dirigeants n'étaient pas encore internautes ;-).
- En revanche, les sondages des utilisateurs de l'Internet santé confirment le bilan extrêmement positif.
- Pourquoi personne n'a suggéré, par exemple, de retirer tous les sites de santé pour "protéger les citoyens" ? Ce serait le tollé absolu...
- R5 Examinons cela dans l'autre sens. Pour que les mauvaises informations sur internet nuisent, il faudrait qu'elles soient suivies d'effet. Or, un internaute n'a pas qu'une source d'information. Il surfe; il voit beaucoup de choses. Et puis, il n'y a pas que l'internet. Vous n'imaginez quand-même pas que l'internaute vient lire un article et met en oeuvre immédiatement tout ce qu'il a lu. D'abord, il voit plusieurs sites au passage. Il consulte son entourage. Il interroge son médecin.
Q6 Mais, je pensais que le médecin était de plus en plus laissé de côté, suite à Internet
- C'est le deuxième fantasme, notamment du côté des professionnels. Citons une deuxième image de bande dessinée, celle du médecin qui reçoit la patiente qui l'agace par son savoir. Et là aussi, c'est une image stéréotypée et dommageable. En fait, ce que recherche le patient est un avis personnalisé, et notamment l'avis de son médecin. D'autre part, l'intérêt du patient pour son propre problème fait partie de la solution. Or les médecins ne s'interrogent pas assez sur le degré d'information de l'autre, l'interlocuteur en face. Ce patient n'ose pas non plus en parler; alors le dialogue est un peu compromis. Et c'est vraiment dommage, car sans interactivité, le patient ne peut donner le meilleur de lui-même et participer aux recherches de solutions. Et le succès thérapeutique est un succès à deux -- sans compter que l'insuccès est plus facile à porter s'il est partagé.
Q7 Alors, pourquoi la France est-elle le seul pays au monde à bénéficier d'un outil de certification de sites ?
- La réponse courte est que l'article L 161-38 de la loi n°2004-810 du 13 Août 2004, relative à l'assurance maladie dit que "la Haute Autorité de Santé est chargée d'établir une procédure de certification des sites informatiques (lisons internet) dédiés à la Santé. Elle aurait pu aussi envisager la création d'un portail "officiel", difficile à réussir.
Q8 Pourquoi ne peut-on créer une base d'informations santé officielles ? Il en existe déjà beaucoup. Et il en était question récemment en France.
- Justement, le Ministère et l'Ordre des médecins avaient animé un premier groupe de travail en 2000/2001 (auquel j'avais participe ainsi qu'à celui de 2007). L'Association Française de l'Assurance Qualité avait relevé en 2000 qu'il n'existe pas une information de référence dans tous les domaines et qu'elle est évolutive. Cela expliquait l'impossibilité de certifier un site sur le fond. D'autre part, les bases de données santé émanent de différentes instances et on ne voyait pas comment tout rassembler. N'oublions pas que la construction de sites à base de données était beaucoup plus lourde à l'époque que maintenant. Aujourd'hui, il faudrait construire un site meilleur que ce qui existe, qui apporterait un réel plus et qui serait interactif et communautaire. Or les sites institutionnels ne sont pas souvent, jusqu'ici, populaires et interactifs, ergonomiques, bien référencés.
Q9 Mais c'était l'époque de la création de NHS Direct au Royaume Uni, et la France commence à y penser maintenant, pourquoi ?
- Parce que NHS Direct version 2010 est un package tentant, où le patient a le choix entre le téléphone et le web ; la réservation est intégrée. Le tout permet de mieux gérer le recours aux urgences au vu de l'organisation britannique de l'offre de soins. Ce n'est donc pas qu'un site web d'informations. Mais, de l'autre côté, l'Angleterre a des milliers d'autres sites santé, malgré NHSDirect. Qui dit que tout citoyen anglais compare l'information "autre" à celui de NHSDirect ? Mathématiquement c'est faux, puisque NHSDirect n'est pas visité par tous les Britanniques, même s'il est connu de 90%.
- La certification des sites santé par le HONCode est effectivement reconnue par la HAS en France depuis automne 2007. Il faut savoir qu'il existe toute une série d'outils de ce type, en France et à l'étranger, en théorie, mais aucun, à notre connaissance, n'a été appliqué à des milliers de sites en dehors de HON. Ils ont été limités par le fait de ne pas être gratuits, d'être trop compliqués, ou tout simplement de ne pas avoir été réellement diffusés.
Concernant le bilan,
En positif:
- 916 sites français certifiés à ce jour
- Les principaux sites institutionnels sont certifiés, ce qui était loin d'être certain lors du lancement
- Il a été démontré que les sites non-certifiés ne respectent pas l'ensemble des 8 critères de la certification
- HON pourrait être un outil de dialogue entre Acteurs de Santé.
En négatif,
- Une minorité de Français seulement est au courant de l'existence du HONCode. Le sujet ne passionne pas assez pour être "viralisable" ;
- Ce n'est pas une certification "sur le fond" -- ce qui déçoit les demandeurs d'une certification
- La certification par une institution n'est pas du 2.0
- et pas des moindres : il existe d'importantes questions sur le choix des sites certifiés...
Et alors ?
Un FAQ n'a pas de conclusions; il n'y a que des conclusions définitives dans les romans sans suite. Ce ne sera pas le cas de l'Internet de santé qui est dynamique et vivant. J'ai participé à des groupes de réflexion sur " la qualité" de l'internet santé" nationaux et internationaux, officiels, semi-officiels, pas officiels du tout à Paris, Washington, Berlin, Heidelberg, Bruxelles, Genève, et j'en passe, sur 10 ans (Serait-il temps de recommencer - pitié ?). Ils ont tous conduit à l'adoption d'outils du type HON, en moins pratique. Si la loi française continue d'exiger l'existence d'une certification, HON est le bon choix.
Je crains qu'on ait du mal en France à estomper la demande d'une certification sur le fond -- demande à la quelle je n'adhère d'aucune façon.
Retenons qu'aucun outil de certification n'est massivement employé par les internautes à ce jour. Dans les faits, l'intelligence collective règne et ce depuis le début de l'Internet, bien avant la naissance des termes 2.0 et médias sociaux.
PS Si nous voulons déployer notre énergie concrètement pour aider les internautes de santé en France, militons pour l'amélioration de la qualité des sites web des hôpitaux et cliniques... ;-)
Quelques réflexions sur la question : http://oph.girmens.fr/2010/06/09/evaluation-des-sites-internet-sante-hon-ou-nonhon/
Rédigé par : JFG | 09/06/2010 à 20:17