Vous êtes nombreux à connaître le Docteur Lucas à travers ses interventions et écrits, voire par le tweet-up #health20fr #hcsmeufr ou la conférence Doctors 2.0 & Vous #doctors20
Vous lirez prochainement son nouveau Livre Blanc et le reverrez à Doctors 2.0 & Vous, mais nous avions envie de connaître ses réponses à encore quelques questions que vous découvrirez ci-dessous.
DS: En quoi consiste votre activité médicale et votre activité au Cnom
JL: J’ai actuellement un double vie ! Mon activité de cardiologue libéral dans un cabinet de groupe et mon activité au Conseil national de l’Ordre. Ces deux activités sont très chargées. Je les mène de front grâce à une organisation assez minutée. D’une manière générale, quand je suis au Cabinet je ne me préoccupe que des patients et quand je suis au CNOM, que des activités ordinales. Le travail en cabinet de groupe permet cela puisqu’en cas d’urgence – et la cardiologie est une discipline qui en comporte beaucoup – mes associés sont présents. Cela fonctionne bien.
DS: Comment avez-vous choisi le métier médical ?
JL: Assez jeune, car je voulais m’occuper des personnes malades d’une façon assez globale. Ma spécialité mère, si je puis dire, est la Médecine interne. C’est dans ce cadre que je me suis orienté vers la néphrologie puis la cardiologie, à une époque où il était possible d’indiquer deux compétences spéciales dans le champ de la Médecine interne. J’ai eu la chance de pouvoir être Assistant des hôpitaux, Chef de clinique à la Faculté dans ces trois domaines qui étaient assez imbriqués. Maintenant, depuis 1981, je ne fais que de la cardiologie.
DS: Depuis quand vous intéressez-vous à l'informatique médicale ?
JL: En réalité depuis assez peu de temps. J’ai d’abord pris conscience de l’apport structurant de l’informatique dans notre cabinet. Les dossiers informatisés obligent à une plus grande méthode dans leur gestion partagée au sein d’un groupe. C’est aussi un gain de temps, pour l’accès immédiat aux dossiers sur le serveur et pour leur consultation. Mes activités au CNOM ont initialement été orientées sur le fonctionnement de l’appareil ordinal, puisque j’ai été assez rapidement élu au secrétariat général. Depuis 2008, je me suis orienté plus activement sur l’informatisation de la santé : DMP, Messageries, Télémédecine. C’est ainsi que j’ai été conduit à prendre conscience de l’irruption d’Internet dans la recherche d’informations, de la part que les médecins devront y prendre et de l’apport de la médecine 2.0 dans la relation médecin-patient qui est le cœur des métiers médicaux.
DS: Comment votre avis a-t-il évolué à ce sujet ?
JL: Il a justement évolué en prenant conscience que le croisement des savoirs scientifiques des médecins avec les croisements des vécus de la maladie par les patients faisaient progresser tout le monde. Ceci étant, je ne pense pas que « l’expertise collective » puisse se substituer à la connaissance reçue par les études universitaires et leur ajustement dans la vie réelle par la pratique. J’observe d’ailleurs qu’il ne faut prendre l’expertise ou la sagesse des foules qu’avec le recul que l’histoire nous a dramatiquement appris au long du vingtième siècle notamment.
DS: Quelle est votre vision de l'e-santé ?
JL: Ce que l’on appelle la « e-santé » est un complexe flou qui mérite d’être examiné champ par champ. Je m’intéresse essentiellement à ce que peuvent apporter les TIC dans la pratique de la médecine et dans le domaine médico-social. Dans mes responsabilités ordinales, je mets le focus sur l’importance des aspects éthiques et déontologiques. J’ai ainsi coordonné plusieurs publications de « doctrine », la dernière s’appelant « Déontologie médicale sur le web ». Le bureau du CNOM m’a également chargé de l’organisation ouverte d’un prochain colloque qui se centrera sur les aspects éthiques des usages concrets des TIC en « e-santé ».
DS : Et votre vision de l'avenir de la médecine... ?
JL: Beaucoup de mes confrères de mes promotions d’étude sont désemparés. Ils voient un monde qui disparait petit à petit alors que celui qui nait est encore confus. Cela crée de l’inquiétude, du désarroi, de l’angoisse parfois. Pourtant si Hippocrate et Galien revenaient ils considéreraient que la médecine, y compris dans ses dimensions humanistes, a progressé en bien. J’ai une vision optimiste de l’avenir de l’exercice de la médecine. Elle sera beaucoup plus coopérative avec les autres professions de santé. Elle sera plus ouverte à l’écoute des patients. Les lois indiquent d’ailleurs ces orientations comme mouvement de fond. C’est à ce titre que la circulation de l’information doit être fluide, ce que les TIC permettent. C’est à ce titre aussi qu’il faut des balises et des vigies : les données personnelles de santé doivent être protégées contre toute exploitation. J’ai écrit quelque part que les sécurités informatique sont des exigences déontologiques. Je n’ai pas de fascination béate pour les TIC pour elles mêmes, mais pour ce qu’elles peuvent permettre de bénéfique pour la personne.
MERCI !
Le Dr Lucas a également été interviewé par le journal du site de l'Ordre.
Je vous invite à aller sur le site pour le lire en format original.
L'interview du mois |
Un nouveau livre blanc à propos de la déontologie médicale sur le web
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Vous allez publier un nouveau livre blanc intitulé « Déontologie médicale sur le web ». Quel est l’objectif de ce travail ? La publication de ce document s’inscrit dans la continuité de nos trois livres blancs précédents sur l’informatisation de la santé, la télémédecine et la dématérialisation des documents médicaux. Notre objectif est d’accompagner le développement des TIC dans le champ de la santé, en y imprimant l’éthique et la déontologie médicales. Nous faisons dans ce nouveau Livre blanc des propositions concrètes pour inciter les médecins à renforcer leur présence professionnelle et humaniste sur le web. Nous exposons également comment ils pourraient y trouver plus facilement des informations pertinentes pour répondre à leurs propres besoins professionnels et leur formation permanente, hors conflits d’intérêts.. Une de vos propositions est de mettre le web au service de la relation médecins-patients. Est-ce possible ? C’est fondamental. L’utilisation du web santé par les patients est massive. Nous considérons que le médecin doit aider les patients à s’orienter vers des sites pertinents et fiables, en donnant son avis sur les contenus que le patient aura lus sur le web, en conseillant des sites de référence, voire en publiant facilement son propre site professionnel, et que ce ne soit pas chronophage. Vous souhaitez également que les médecins contribuent à produire de l’information en santé. Pourquoi ? Oui, nous encourageons les médecins à prendre toute leur place sur la Toile, car ils représentent la source d’information la plus fiable aux yeux des patients, et qu’ils ont un devoir d’information. Nous explicitons cela, afin que ce ne soit pas considéré comme de la publicité. Les règles de déontologie que nous rappelons sont simples et pourront être vérifiées par l’internaute. Vous appelez à un usage responsable des médias sociaux. Qu’est-ce que cela signifie concrètement ? L’usage des médias sociaux numériques ira croissant dans le domaine médical et médico-social. Il faut garder à l’esprit que ce sont des lieux d’expression publique. Cela implique, au regard de la déontologie médicale : la mesure des propos, l’humanisme, le respect des personnes, la responsabilité dans la citation des sources... Ce qui n’exclut en rien les convictions, les émotions, la force des arguments, la liberté d’expression. Nous donnons un certain nombre d’orientations concrètes en ce sens, par exemple sur l’usage du pseudonyme. Vous vous exprimez également sur le « téléconseil ». Comment définissez-vous cette pratique ? Le téléconseil recouvre une pratique qui consiste à mettre à disposition, le plus souvent à titre onéreux, une information personnalisée à la demande d’un internaute non connu. Lorsque cela est effectué par un médecin, il s’agit clairement d’une prestation médicale qui engage totalement sa responsabilité civile et déontologique. Nous demandons donc à la puissance publique de réglementer cette activité, avec les aspects déontologiques que nous exposons. Vous préconisez aussi la reconnaissance de l’acte de conseil par téléphone ou par courriel pour des patients déjà suivis par le médecin… En effet. Cela est d’ailleurs l’autre versant de ce que je viens de dire. Devant l’augmentation des malades chroniques, comme de la dépendance, les médecins passent un temps de plus en plus important à adapter les traitements de leurs patients, par contact téléphonique ou par courriel. Il est indispensable que cela soit reconnu, sécurisé et valorisé. C’est notoirement le cas en médecine de premier recours. Mais ce n’est pas exclusif, les exercices spécialisés et hospitaliers sont également concernés. |
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